De la symbolique du loup dans l’inconscient collectif à la description du remède homéopathique Lycopodium clavatum.
Atalante fugitive – Emblème XXIV
Version anglaise de cet article
Lycopodium clavatum, une fougère herbacée
Lycopodium clavatum est une fougère herbacée. Les rameaux renferment des spores qui constituent la « poudre de lycopode ».
Lycopodium clavatum est une plante de la famille des lycopodiacées d’où s’élèvent des pédoncules ronds portant à leurs extrémités deux petits épis cylindriques, géminés, composés de capsules réniformes à deux valves.
Les spores contenues dans ces capsules forment la poudre de lycopode, de couleur jaune pâle, fine, très légère, et extrêmement inflammable. Cette qualité l’a fait employer par les artificiers qui lui ont donné le nom de soufre végétal. Les rameaux renferment des spores qui constituent la « poudre de lycopode ».
La symbolique du Loup et du médicament
L’appellation de « petit pied » ou « petite patte » serait liée à l’aspect des jeunes rameaux qui peuvent évoquer la patte de loup. La mention du loup est importante car certains aspects de cet animal correspondent à des symptômes déclenchés lors de la pathogénésie du remède.
C’est en effet très caractéristique lorsque l’on compare la vie et les mœurs du loup à la matière médicale homéopathique du remède. Cette confrontation permet de constater que certains symptômes homéopathiques ont une correspondance dans la forme de la substance. Nous sommes alors en présence de véritables symptômes symboliques archétypaux de la substance.
Étymologiquement on peut observer la séquence suivante : λυκ-οσ → λυκο-ποδεσ (pied de loup) → patte de loup → griffe de loup → herbe aux massues et pour son côté inflammable soufre végétal.
Le loup dans l’inconscient collectif
Une des notions les plus marquantes dans la vie du loup semble l’acquisition du territoire, avec la différenciation des générations et des sexes. Certes ces notions sont communes à la plupart des espèces, mais elles paraissent particulièrement fondatrices chez le loup.
La constatation, dans notre inconscient collectif occidental, de la présence quasi obsédante du loup, particulièrement dans l’imaginaire de l’enfant, accentue son importance dans les profondeurs de notre inconscient. Il est possible que pour d’autres civilisations, un autre animal le détrône.
Dans les rêves de l’enfant, dans les contes, dans les jeux enfantins de nos pays, la présence du loup est constante. On peut même s’en étonner lorsque l’on prend conscience de la place dérisoire du loup dans notre vie quotidienne et de la difficulté à conserver quelques espèces dans nos campagnes.
L’emblème XXIV de L’Atalante fugitive montre un loup qui dévore le corps du roi inanimé (illustration ci-dessus). Le texte précise que par sa propre mort, il lui est restitué la vie et la force.
« Efforce-toi de capturer le loup vorace.
Pour l’apaiser, à ce glouton jette le corps
Du roi ; puis place-le sur un bûcher ; le feu
Excité par Vulcain le réduira en cendres.
Opère ainsi souvent et tu verras le roi,
Doté d’un cœur de lion, surgir, fier, de la mort. »
Le remède homéopathique lycopodium clavatum
On trouve la pathogénésie princeps de lycopodium clavatum dans les Maladies chroniques de S. Hahnemann.
Il existe une synchronicité manifeste entre la plante et la symbolique de sa dénomination. Hasard significatif, peut-être, troublant si l’on juxtapose les symptômes de la pathogénésie, les cas guéris et la symbolique du loup.
La peur de ne pas occuper son territoire
Lycopodium a peur de ne pas occuper un espace assez vaste. Il cherche à le consolider. Seule la domestication du territoire rend possible le passage de l’état sauvage à l’état social.
Lycopodium est centré sur une autorité mâle. Il se veut le centre de la famille, a la prédominance du géniteur, incarne la force masculine, se veut le père, le chef, s’imagine une autorité irrésistible. Le devoir filial est son point fort (ou faible). Les sujets lycopodium sont brillants intellectuellement mais faibles physiquement, peureux, lâches, coléreux, autoritaires.
Le déroulement de la vie de lycopodium ressemble à un damier, une sorte d’échiquier, d’arène, où vont s’affronter deux protagonistes, le père et l’enfant, le grand et le petit, le vassal et le souverain, l’ombre et la lumière, le yin et le yang, le masculin et le féminin.
L’échiquier symbolise le théâtre de ce combat, sur soi même et sur les autres, à la conquête d’un territoire, pour faire échec au roi.
Fondamentalement, lycopodium a peur, peur de ne pas avoir de territoire. Cette peur peut s’exprimer d’abord au plexus solaire, localisation de toute la vitalité du sujet. Cette peur peut avoir des objets : les autres, le soir, la solitude, etc. Lycopodium a le plexus solaire noué. Il a la peur au ventre.
Manque de confiance et désir de domination sociale
Lycopodium redoute la solitude et a le désir de compagnie. Cet être qui, par moments, peut paraître sûr de lui a un manque fondamental de confiance en soi, un manque d’estime de soi, qu’il devra toute sa vie compenser par une attitude de positionnement supérieur, de domination sociale.
Lycopodium va compenser pour résister à ce sentiment de manque de confiance et à cette insécurité. Il va essayer de délimiter un territoire, qui sur le plan intérieur va correspondre à une recherche active d’identité et sur le plan extérieur à une tendance très nette à occuper l’espace qui l’entoure.
Cette activité sera plus nette au niveau intellectuel que physique. Il ne faut pas lui « marcher sur les pieds ». Outre le fait qu’il peut avoir une grande autorité comme nous le verrons, il a un sens inné de son territoire. Les enfants lycopodium défendent avec beaucoup de conviction leur chambre, surtout lorsque les petits frères ou les petites sœurs viennent y mettre les pieds.
La peur d’être faible et petit
Lycopodium a peur d’être petit, de rester petit, de devoir regarder le monde en levant la tête. Sa peur fondamentale est celle d’être faible et petit, d’être un petit enfant. On imagine que lycopodium va mettre des hauts talons. Il a tellement envie de voir le monde au même niveau que les autres, et même plus haut que les autres, qu’il va tout faire pour se rehausser.
Il est vrai que lycopodium est une plante rampante qui s’allonge parfois loin sur le sol puisqu’elle peut atteindre une longueur d’un mètre et parfois plus.
Lycopodium rêve de géant. Il s’agit bien là d’un rêve qui exprime sa problématique. Lycopodium va compenser sa sensation de petitesse en projetant un combat de David contre Goliath, qu’il va évidemment gagner grâce à sa ruse et à son intelligence.
Centré sur l’autorité masculine paternelle
Lycopodium est centré sur l’autorité masculine paternelle, il est le centre de la famille, il a l’autorité du père, le devoir filial est son point fort (ou faible). Lycopodium va compenser sa peur fondamentale par une prise d’autorité qui passe par la loi.
Le sentiment inconscient de la nécessité d’une instance masculine ou de son équivalent (pour imposer la castration) va conduire lycopodium à une inflation de l’autorité. C’est le domaine du père ou de la fonction paternelle.
Il existe souvent chez le garçon une histoire de père autoritaire qu’il faut éliminer, castrateur et chez la fille une image d’animus où elle reste prisonnière du souvenir d’un père qui déclenche un mélange d’amour et de haine.
De nombreux symptômes de lycopodium sont situés à droite
Chaque individu est un cas particulier, et la fonction paternelle sera peut-être pour certains localisée à gauche. Néanmoins, on peut dire que dans l’acception classique de l’inconscient collectif de la langue et des symboles, droit, droite sont synonymes d’autorité, de rigueur.
De nombreux symptômes de lycopodium sont situés à droite : angine à droite améliorée en buvant chaud (parfois froid). La parole du chef reste bloquée dans la gorge comme une autorité prompte à se mettre en colère. La narine droite bouchée est souvent évocatrice de lycopodium. Il peut présenter une hernie inguinale droite.
La région inguinale hypertrophiée et enflammée marque une hypertrophie de sa pulsion à agir, à procréer. La région inguinale droite souligne une tension dans la zone inguino-génitale, une sorte de surcompensation qui témoigne de la peur du “trop peu”. Il peut présenter des éruptions, des douleurs souvent situées à droite.
Il manque fondamentalement de confiance en lui-même
Lycopodium manque fondamentalement de confiance en lui-même. Il a peur de manquer de limites, de repères, de lois. Cette peur fondamentale rejoint la peur d’être attiré par le parent de l’autre sexe, de ne pas avoir de tutelle paternelle capable de fixer des limites, ou l’énergie nécessaire pour prendre son envol hors du nid de l’enfance.
Il s’agit d’une angoisse terrible de ne pas se sortir du « terrier » primitif ou d’être englouti dans une régression qui pourrait devenir mortifère. C’est aussi la tentation de la transgression maudite ou du moins le choix d’un partenaire avec une grande différence d’âge (un père avec une femme qui pourrait être sa fille ou une femme avec un homme enfant).
L’enfant voudra faire aussi bien que sa mère ou que son père. Il va faire de son mieux pour obtenir son autonomie pour deux raisons : d’abord pour sortir du cocon parental, pour se faire plaisir, mais aussi pour faire plaisir à ceux-là mêmes qui l’élèvent et ainsi obtenir une reconnaissance qui n’est pas sans procurer une jouissance personnelle.
Un remède de colère, de passion, d’énergie, de force
Lycopodium va décompenser. Lycopodium est un remède du foie. C’est bien sûr un remède de colère, de passion, d’énergie, de force. Cette “bile” va couler dans les articulations et provoquer des “rhumatismes”. C’est un remède de douleurs articulaires, un remède de goutte. L’appareil digestif réagit au premier plan avec des douleurs à type de colique.
Il existe dans l’imaginaire une bête redoutable capable de croquer les petites filles, les enfants, les humains qui atteint des sommets, en particulier avec l’histoire de la Bête du Gévaudan. Elle tua plus de cent personnes au XVIIIe siècle et illustre cet aspect terrifiant du loup.
Il y a certainement une vérité au fond des récits de l’époque, mais l’imagination de l’inconscient collectif a vraisemblablement ajouté des aspects effroyables à cet animal mythique. Il est un aspect de l’ombre redoutable du père, de l’animus ravageur qui dort dans nos inconscients.
Le caractère dictatorial est un des aspects les plus connus de lycopodium. C’est un “dictateur”, celui “qui commande”. Bien entendu l’autorité abusive de la loi peut aboutir à une dictature qui est une tentative de résister à ce qui est vécu de l’intérieur comme un danger et une menace par manque de confiance en soi.
L’un des caractères les plus marquants de Lycopodium est aussi sa tendance à séduire, son donjuanisme, qui peut aller jusqu’à l’obsession. Il recherche particulièrement les conquêtes faciles.
En conclusion
Lycopodium clavatum est un remède immense de la pharmacopée homéopathique. Il est hanté par son territoire, par le souci de sa grandeur. Il est le remède de la crise autoritaire, de la séparation de la symbiose où le sujet est confronté à la fonction paternelle.
Important : il est possible que l’un des remèdes décrits sur ce site vous convienne, mais on ne peut l’affirmer sans un interrogatoire et un examen sérieux effectués par un médecin homéopathe. Le site est fait pour faire connaître l’homéopathie, en aucun cas il ne peut se substituer à un thérapeute. Le docteur Bernard Long n’assure plus de consultations.
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Ouvrages
Symboles et archétypes en homéopathie, reprend un certain nombre d’articles publiés sur ce site et les complète.
Le Répertoire homéopathique des maladies aiguës complète utilement cet ouvrage.