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Bernard Long

Bernard Long, médecin homéopathe, publie plusieurs textes sur l’homéopathie et les symboles.

 

Ses recherches s’appuient également sur les travaux de C.G. Jung.

Anacardium orientale, ange ou démon ?

Le sujet Anacardium est un être double habité par une ombre inconsciente, au sens où l’entend Jung. Cette ombre le harcèle et le pousse à une conduite chaotique. 

La plante et le remède selon Hahnemann

Anacardium orientale est le fruit de l’anacarde d’Orient, fève de Malac, de la famille des térébinthacées. Semecarpus anacardium L. ; noix d’acajou.

On trouve le remède chez Hahnemann (1) :

« C’est le fruit d’un grand arbre (Avicennia tomentosa), qui, du temps des Arabes, croissait en Sicile, sur le mont Etna, et qu’on trouve aujourd’hui dans les forêts des Indes Orientales, renferme, entre son enveloppe extérieure, dure, cordiforme, d’un noir brillant, et son amande douce, revêtue d’une pellicule mince et rougeâtre, un suc noirâtre, épais, contenu dans du tissu cellulaire, avec lequel les Indiens marquent leur linge d’une manière indélébile, et dont l’âcreté est telle qu’il peut enlever les taches connues sous le nom d’envies. Rarement ces fruits nous parviennent assez frais pour que le suc conserve encore un peu de liquidité, la mollesse du miel : ordinairement il est sec. Pour les usages de l’homœopathie, on en prend un grain, qu’on traite à la manière des autres substances sèches, en le dynamisant comme de coutume ».

Le nom de genre anacardium vient du grec ancien ἀνά (aná, “sur”) et de καρδία (kardía, “cœur”), soit « au-dessus du cœur », car le pseudo-fruit peut être parfois rouge et en forme de cœur.

 

Profil et symbolique de anacardium orientale homéopathique

 

L’ombre

Il semble bien que nous soyons en présence d’un problème d’ombre chez anacardium orientale.

Mais qu’entend-on par ombre ?

Jung la définit comme la partie inférieure de la personnalité, somme de tous les éléments psychiques personnels et collectifs qui, incompatibles avec la forme de vie consciemment choisie, n’ont pas été vécus (cf. Ma vie, p.459) Il écrit encore qu’en psychologie on définit l’ombre comme le côté inférieur de la personnalité, celui qui est attaché à la terre (cf. Les rêves d’enfants. tome 1, p.158).

Marie-Louise von Franz écrit que les rêves nous familiarisent avec des aspects de notre personnalité que, pour diverses raisons, nous avons préféré ne pas examiner de trop près (cf. L’homme et ses symboles, p.168-169)). L’ombre, dans les rêves et les mythes, apparaît toujours sous la forme d’une personne du même sexe.

Un rêve significatif

Pour décrire la problématique d’anacardium orientale, il est intéressant de considérer le rêve n° 16 de la série de la rêveuse décrite par Ariane Callot  :

« Il y a deux femmes nues dans une cage à fauves avec de gros barreaux. L’une calme et silencieuse est tassée dans un coin, à droite, au fond. L’autre très voyante, très agressive et agitée, est dans le coin gauche, contre les barreaux. Du côté de la femme agressive il y a un homme « sans corps et sans visage » qui l’interroge. Il est plutôt amical au début mais elle se montre violente et rusée, employant tous les moyens pour lui résister.

Il semble vital pour l’homme qu’elle parle et il finit par la torturer en lui envoyant de l’électricité. Elle n’en peut plus et, conseillée par la femme calme, elle pleure. Cela fait hurler de fureur l’interrogateur. Alors elle sort, entre les barreaux de la cage, un pied nu et c’est insupportable pour tout le monde. La Rêveuse est très impressionnée par ce rêve et a l’impression qu’elle DOIT en comprendre le sens. ».

Deux images contradictoires

Nous sommes en présence de la rêveuse et de son ombre. Il existe donc une rivalité entre deux personnages, l’image consciente du sujet et celle qui apparaît, contradictoire, issue de l’inconscient.

Pour anacardium, il y a une contradiction interne, un clivage fondamental entre deux tendances, celle de l’esprit et celle du cœur.

Comme Caïn, le sujet anacardium désire la reconnaissance de lui-même, de sa performance et de sa valeur existentielle, mais, comme Caïn, il se sent intérieurement repoussé et comme un raté sans importance. Ce que sa tête dit savoir, son cœur ne peut l’accepter et ce que désire son cœur, sa tête ne peut lui concéder (2).

La symbolique de l’Égypte ancienne

Nous sommes en présence d’une représentation synchronique du fruit de la plante, structure double qui comprend une noix surmontée d’une sorte cœur.

Il y a là un parallélisme entre cette vision cœur/esprit et la conception antique du cœur physique et du cœur/esprit (3).

Le ib égyptien semble correspondre dans les textes médicaux à la zone phrénique (correspondant au φρήν grec) ou à une zone viscérale plus générale, une sorte de plexus solaire, siège de la personnalité, de la sensibilité, de la mémoire et de la pensée alors que le ḥ3ty correspond au cœur physique, siège du souffle vital, des émotions, du courage.

Curieusement ce hiéroglyphe ressemble au fruit de l’anacardium. Il correspondrait à une sorte de centre énergétique, un peu l’équivalent du manipura du yoga de la kundalini. (cf. Jung, Les énergies de l’âme, p.205).

Les conflits émotionnels

A l’époque homérique, l’esprit résidait dans la région du diaphragme. Certaines peuplades africaines situent le siège de leurs émotions et de leurs pensées dans l’estomac.

La pathologie de ce centre entraine des troubles divers. Troubles du comportement, de la mémoire, de la conscience, siège d’un conflit entre le sentiment et la pensée. Il y a des assauts du ib et du centre cardiaque des pulsions et du désir. Il s’agit, pour résumer, d’un conflit entre la raison et la pulsion.

Ce centre est l’arène où deux influences s’affrontent, une tendance terrestre « démoniaque » primaire et une tendance raisonnable et sage.

La dissociation entre l’esprit et le corps

Il y a une dissociation entre l’esprit et le corps, ce que montre bien le rêve n° 1 :

« La Rêveuse est devant une paroi de pierre, lisse comme une cloison, avec un trou rond qui donne sur on ne sait où, un autre endroit.

De l’autre côté du trou, dans lequel la Rêveuse a engagé la partie supérieure de son corps pour essayer de passer par le trou, se trouve un homme inconnu très séduisant, l’imagine la Rêveuse car elle ne voit pas le visage de cet homme. Derrière elle, il y a la présence discrète de son mari et d’une femme mûre d’allure très dominatrice et à la voix autoritaire qui s’agite beaucoup. Elle crie : « Vas-y, fais un effort, empotée ». La tête et les épaules de la Rêveuse passent mais la partie inférieure de son corps est coincée. Elle sent que si elle s’arrachait la peau, si elle n’avait pas peur de se faire mal elle arriverait peut-être à passer mais elle bloque.

L’homme, de l’autre côté de la paroi, encourage la Rêveuse, tend ses bras vers elle, prend ses mains pour essayer de la tirer. Pendant ce temps la femme autoritaire continue à se manifester. Cela énerve la Rêveuse qui sort du trou et dit : « Tu n’as qu’a passer toi ! » La femme répond avec une curieuse modestie : « Comment veux -tu que j’y arrive si tu n’y arrives pas ». »

Nous assistons à une sorte de naissance, avec la présence d’un animus positif et d’une femme à l’animus négatif, une ombre puissante, autoritaire, dominatrice, qui traite la rêveuse d’empotée. Dans le cas présent l’ombre est probablement liée à l’animus négatif, lui-même lié à l’animus maternel.

La représentation est commencée et la Rêveuse a engagé la partie supérieure de son corps dans le trou. Il y a donc une possibilité de passer de l’autre côté de la paroi rocheuse, mais le tête passe, alors que le bas du corps est coincé.

L’antagonisme intérieur

Anacardium orientale est caractérisé par un antagonisme avec lui-même. Il a l’impression d’être possédé par deux volontés, ses actions sont contradictoires avec ses intentions.

Il a la particularité de ressentir la présence d’êtres négatifs, comme des démons. Un démon qui lui parle dans une oreille alors qu’un ange lui parle dans l’autre oreille. Un démon est assis sur son cou et lui chuchote des grossièretés. Il rêve d’une odeur d’amadou et de soufre.

Ce tableau correspond à l’image manichéenne du rêve n° 16 (voir ci-dessus) de la rêveuse avec ces deux femmes, l’une calme et silencieuse et l’autre démoniaque.

Anacardium orientale vit mal son incarnation

Anacardium orientale a des sensations physiques particulières. Il s’imagine que ses pensées et son esprit sont séparés de son corps, que sa tête est séparée de son corps, que son âme est trop petite pour son corps.

En fait il refuse son corps, il vit mal son incarnation. Il identifie corps et mal, alors que le corps est nécessaire au bien de l’esprit. Il veut être intellectuel, âme pure (4).

Dans le cas de la rêveuse, il semble qu’il y eut des difficultés à reconnaître et vivre sa féminité.

Les conséquences sur le corps

Le corps d’anacardium se couvre d’éruptions varioliformes (dans le rêve n° 1, la rêveuse craint de s’arracher la peau). Il est sujet aux démangeaisons. Il a la sensation d’avoir un coin, un pieu enfoncé dans différentes parties de son organisme.

Il présente des verrues et a les tendons fragiles (tendon d’Achille). La peau n’est-elle pas ce qui sépare du monde extérieur, le coin enfoncé ne cherche -t-il pas à désunir, les tendons ne sont-ils pas ce qui relie, qui fait cohésion ?

Violence et douceur

Le sujet anacardium a un caractère difficile et un ego développé. Il est colérique et provoquant. Il peut refuser les caresses, taper, frapper, jurer. Il peut aussi être vénal, sale, misanthrope, hautain, et même sans cœur et sans scrupule. Sa violence et sa brusquerie peuvent aller jusqu’à la cruauté. À cela s’ajoute un côté destructeur, jaloux, autoritaire et même blasphématoire.

Bien des personnes qui ont besoin d’anacardium sont dans l’incapacité d’exprimer leur colère mais  ont des rêves et des fantasmes très violents. D’un autre côté, cette colère peut être enfouie profondément et transparaitre de temps en temps de sinistre façon ; c’est ce que l’ombre exprime.

Chez ceux qui ont besoin de ce remède, il y a une grande séparation entre l’état conscient et l’ombre inconsciente. Ce qui implique l’impression que l’esprit et le corps sont séparés et qu’un démon chuchote dans une oreille (5).

C’est un sujet qui peut être très poli, bien élevé mais qui est involontairement désagréable. Il ne peut s’empêcher de dire exactement le contraire de ce qu’il pense, même à la personne qui lui est la plus chère (6)

Selon sa personnalité double, il se montre aussi affectueux. Il est évident qu’il peut surmonter ses démons par une conscience morale qui le refrène. Sa contradiction entre la « pulsion et la raison » est tempérée par la raison qui prend le pas.

Anacardium manque de confiance en soi et envers les autres

Anacardium manque de confiance en soi. Tout le monde lui inspire de la défiance ; il a si peu de confiance en soi qu’il désespère de pouvoir faire ce qu’on exige de lui. Il a l’impression qu’il est dans un rêve. Il a une sensation de séparation du monde, de la société, des lois, de l’humanité, de la famille. Il lui arrive de s’entendre appeler par sa mère et sa sœur alors qu’ils sont au loin.

Du combat entre anacardium et son ombre, entre le physique et l’esprit, résulte une sidération mentale car Anacardium déprime le fonctionnement du corps et de l’esprit. Alors son esprit est ralenti à tel point qu’il peut paraître stupide. C’est ainsi qu’il est irrésolu, puisqu’il présente une dualité de la volonté.

Il a des pertes soudaines de la mémoire. Il souffre de trac aux examens. Il manque aussi de ressort ce qui provoque chez lui une envie de manger. Cela l’améliore énormément car son état s’aggrave lorsque son estomac est vide.

Il est abattu, il craint d’être poursuivi, il a l’impression qu’on le persécute. Il n’aime pas qu’on le regarde.

Anacardium est inquiet chaque fois qu’il doit agir et tout lui inspire des craintes car il se croit toujours entouré d’ennemis.

Conclusion

Anacardium orientale est habité par une ombre inconsciente, au sens jungien du terme, qui est le double négatif de son image consciente. Cette ombre dissociée, manichéenne, le harcèle et le pousse à une conduite chaotique.

Il se doit de la reconnaître et de l’intégrer pour accepter en lui un aspect terrestre refoulé qui lui semble négatif et grossier. Ceci afin d’accéder à une individuation harmonieuse entre conscient et inconscient, entre le Soi et le moi.

Notes

1Doctrine et traitement homœopathiques des maladies chroniques. Traduction Jourdan. Tome 1. Paris ; Baillière : 1846. p. 356.

2 – cf. E. C. Whitmont – Der Traum in der homöopathischen Praxis – Göttingen ; 1998.

3 – Bernard Long. Le ib et le ḥ3ty dans les textes médicaux de l’Égypte ancienne. in : Hommages à François Daumas, Montpellier, Institut d’Egyptologie, Université Paul Valéry, 1986, p.483

4 – cf. Loutan G. – Répertoire de thèmes et de matière médicale dynamique – Esneux : Editions Liégeoises d’Homéopathie ; 2000.

5 –  cf. J. Cicchetti – Dreams, Symbols & Homeopathy – North Atlantic Books : Berkeley ; 2003.

6 – cf. R. Dufilho – Les symptômes mentaux en homéopathie – Pau ; 1986.

 

Important : il est possible que l’un des remèdes décrits sur ce site vous convienne, mais on ne peut l’affirmer sans un interrogatoire et un examen sérieux effectués par un médecin homéopathe. Le site est fait pour faire connaître l’homéopathie, en aucun cas il ne peut se substituer à un thérapeute. Le docteur Bernard Long n’assure plus de consultations.

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Bernard Long

Bernard Long, médecin homéopathe, publie plusieurs textes sur l’homéopathie et les symboles.

Ses recherches s’appuient également sur les travaux de C.G. Jung.

Il est l’auteur de nombreux ouvrages.

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Médecin homéopathe, j’ai entrevu des ponts très évidents entre le monde jungien et l’homéopathie.
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