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Ariane Callot

Ariaga
Ariane Callot est docteur en philosophie. Elle a soutenu en 2000 une thèse orientée sur Jung.

Sous le pseudo d’Ariaga elle est l’auteur du blog Extraits du Laboratoire d’Ariaga.

Sur le présent site elle publie des textes repris de sa thèse, des écrits sur Jung et des poésies.

« L’érotique » jungienne : Anima et Animus

L’animus de la femme et l’anima de l’homme. Leurs difficiles et complexes relations. Leurs aspects positifs et négatifs.

Une définition simple

Quand on rencontre dans les textes de Jung, en particulier ses interprétations de rêves, les termes anima et animus, une explication très simple peut leur être donnée :

• si il s’agit d’un homme, l’anima est une personnification des tendances féminines de sa psyché,

• si il s’agit d’une femme, l’animus est une personnification de ses tendances masculines.

Anima et animus sont des facteurs de relations entre l’inconscient et le Moi et entre les pôles opposés masculin-féminin ce qui, dans le cadre d’une sorte d’”érotique” jungienne, trace une voie allant du biologique le plus élémentaire à la complexité des rapports entre Eros et Logos.

Bien que nous pensions que, pour être bien comprises, les notions d’anima et d’animus doivent surtout être observées comme acteurs de représentations dans les séries de rêves, il est nécessaire de donner quelques repères supplémentaires pour éviter de se perdre dans la pensée de Jung, tout à fait foisonnante à ce sujet.

Notre opinion sur l’animus féminin a été récemment très influencée par la lecture du livre dirigé par Agnès Vincent et intitulé L’âme des femmes, le masculin dans la psyché féminine (Réel éditions). Elle montre, entre autres, le côté démodé de ce que Jung pensait de la relation homme-femme.

Jung et l’idée d’androgynie de l’être humain

Comme toutes les représentations archétypiques jungiennes l’anima, à laquelle Jung s’est intéressée avant l’animus, est ainsi nommée parce qu’elle émane d’une image intérieure, une image dans l’âme, contrairement à la persona qui est une image extérieure.

Jung, dans Les racines de la conscience (p. 42.) donne une explication biologique au fait qu’il y ait une sorte de résidu du caractère du sexe opposé :

“L’image du sexe opposé réside, jusqu’à un certain point, dans chaque sexe, puisque biologiquement c’est seulement le plus grand nombre de gènes mâles qui fait pencher la balance dans le choix du sexe masculin. Le nombre moins grand de gènes féminins paraît constituer un caractère féminin qui, cependant, demeure d’ordinaire inconscient par suite de son infériorité quantitative.”

C’est sur cette présence des deux éléments masculin et féminin qu’il fonde son idée de l’androgynie de l’être humain.

Cette idée d’androgynie de l’être humain est enracinée dans le biologique et dans la totalité psychique conscient-inconscient. L’inconscient aurait alors la coloration du sexe opposé. Comment reconnaître et rendre accessible à l’expérience les manifestations de cet archétype ?

C’est un des sujets sur lequel Jung est le moins clair. Cependant, avec de nombreuses digressions sur le fonctionnement général de la psyché, il nous donne des indications dans plusieurs ouvrages-guides dont nous retiendrons Dialectique du Moi et de l’inconscient, Les racines de la conscience, Aïon, et Psychologie du transfert.

L’ombre est la plus proche de la conscience

Quand on reste au niveau de l’inconscient personnel, c’est l’ombre qui est le plus facilement accessible à l’expérience. Ses projections, dans les rêves ou les phantasmes, ont pour origine des propriétés de la personnalité, considérées comme peu souhaitables pour la bonne apparence de la persona. Les représentations de l’ombre renvoient au même sexe que celui de cette personnalité dont elles sont le côté négatif. Cependant, des symboles peuvent surgir qui renvoient non au même sexe mais au sexe opposé :

“On rencontre ici l’animus de la femme et l’anima de l’homme, deux archétypes se répondant l’un à l’autre, dont l’autonomie et la nature inconsciente expliquent l’opiniâtreté de leurs projections. L’ombre n’en est pas moins un thème connu de la mythologie, mais dans la mesure où elle représente d’abord et en premier lieu l’inconscient personnel, et ou ses couleurs sont, par suite, facilement capables de conscience, c’est précisément par son aptitude à se laisser plus aisément discerner et réaliser qu’elle se différencie de l’animus et de l’anima , lesquels sont nettement plus éloignés de la conscience et ne sont donc, dans les circonstances habituelles, que rarement, sinon jamais, perçus.“ ( Aïon, p. 22.)

Anima et animus sont des personnalités de l’inconscient

Non seulement anima et animus sont très difficiles à discerner mais, du fait que ce sont des personnalités de l’inconscient, ils se présentent, dans la vie courante, toujours projetés sur l’entourage car “tout ce qui est inconscient est projeté”.

Le premier réceptacle de « l’image de l’âme » sera la mère pour le fils et le père, ou un substitut, pour la fille. Une véritable infirmité psychique peut se rencontrer quand l’anima est en jachère, ce qui signifie qu’aucune relation n’a été instaurée, ou que la relation a été complétement rompue ou occultée.

peinture sur bois

Jung a longtemps observé les manifestations de l’anima et s’il a décidé d’employer ce terme, c’est parce que l’expression “âme” lui semblait trop générale et trop vague pour désigner une réalité spécifique :

“L’élément empirique compris sous le concept d’anima est un contenu extrêmement dramatique de l’inconscient ; si on peut le décrire en langage rationnel, scientifique, on ne parvient pas, et de loin, à en exprimer la nature vivante.”( Aïon, p. 26)

C’est pourquoi il a choisi une vision et un mode d’expression mythologiques car ils lui semblent plus expressifs et plus exacts qu’un langage scientifique abstrait.

Il a semblé à Jung qu’il devait exister, chez la femme, un équivalent de la représentation archétypique masculine.

Il ne s’agit cependant pas d’une déduction abstraite car des expériences nombreuses et minutieuses lui ont été nécessaires pour mettre en évidence la nature de cet animus.

Si on met face-à-face anima et animus, ils ont pour point commun d’être des projections spontanées de l’inconscient, personnifiées dans les rêves visions et phantasmes. Cependant, si leurs racines sont communes, leurs manifestations sont aussi différentes que le sont les hommes et les femmes. De plus, ils ont tous deux des aspects négatifs, comme les complexes avec lesquels ils sont en relation, et des aspects positifs.

Les manifestations de l’anima chez l’homme

Dans la vie courante, la manifestation négative de l’anima induit, chez l’homme, des sentiments et des humeurs vagues, de l’irritabilité, une impression d’insécurité et de la susceptibilité. Cela a pour origine une influence négative de la mère.

Il peut aussi y avoir, chez l’homme possédé par son anima, une propension à l’ironie et aux réflexions venimeuses et destructrices. Si la relation à la mère est positive, l’homme a tendance à devenir trop sentimental ou efféminé. L’anima l’entraîne aussi vers des jeux intellectuels stériles et des discussions pseudo-philosophiques qui l’excluent de la vie réelle.

L’anima est “LA” femme dans l’homme et souvent au cours de sa vie amoureuse, il va désirer conquérir une femme qui corresponde, tout au moins le croit-il, à la nature particulière de sa féminité inconsciente. Il ira de déceptions en déceptions car aucune femme ne pourra correspondre à l’idée qu’il se fait de la femme parfaite correspondant à cette merveilleuse anima.

Rappelons aussi que, pour Jung, l’anima féminine de l’homme est un facteur :

“supra-individuel qui a quelque chose de typique, plongeant ses racines profondes, en quelque lieu, par delà les liens superficiels visibles.” (Dialectique du moi et de l’inconscient, p. 148.)

L’anima médiateur entre le Soi et le Moi

Quand l’anima s’exprime dans sa fonction de médiateur entre le Soi et le Moi, Jung observe dans Psychologie du transfert (p. 27) quatre niveaux de son image. Il s’appuie sur la “phénoménologie érotique” de l’antiquité tardive, qui connaissait déjà l’échelle des quatre : Chawwa (Eve), Hélène (de Troie), Marie et Sophia. Il propose quatre degrés de l’éros hétérosexuel :

“Le premier stade, celui de Chawwa, Eve, la terre, est uniquement biologique ; la femme y signifie la mère et ne représente rien d’autre que ce qui doit être fécondé. Le deuxième stade concerne un éros à prédominance encore sexuelle, mais de caractère esthétique et romantique, et la femme y possède déjà quelques valeurs individuelles. Le troisième stade élève l’éros à la vénération la plus haute et à la dévolution religieuse, et ainsi le spiritualise. Contrairement à Chawwa il s’agit ici de maternité spirituelle. Le quatrième degré enfin éclaire un aspect qui, de façon inattendue, va plus loin que le troisième stade, pourtant difficilement surpassable : c’est la “Sapientia .”

Nous voyons que la sagesse illustre un niveau plus élevé que la pureté et la sainteté. Pour Jung, ce degré représente une spiritualisation d’Hélène, ”c’est à dire l’éros pur et simple” et la Sulamite du Cantique des Cantiques en est le symbole.

peinture sur coque

L’animus est issu de l’expérience ancestrale féminine

L’animus, dans l’optique jungienne, est une condensation des expériences accumulées tout au long de la phylogenèse par la lignée ancestrale féminine au contact de l’homme.

La femme se sent encore très liée à ces expériences, car elle a une conscience aiguë des interrelations personnelles, ce qui n’est pas toujours le cas pour l’homme qui est plus porté vers les données objectives ou les idées abstraites. Il est donc tout à fait normal que l’inconscient de la femme manifeste des aspects essentiellement différents de l’inconscient masculin.

Alors que l’anima est la source d’humeurs et de caprices, l’animus engendre des opinions reposant sur des préjugés inconscients et des a-priori.

La femme, dominée par son animus, possède, ou plutôt est possédée, par des convictions qu’elle est prête à défendre avec, parfois, une violence toute masculine.

L’animus négatif ne croit pas aux exceptions. Il est fréquemment très pessimiste, dévalorisant, et émet des jugements relevant le plus souvent d’une vérité générale qui ne s’applique pas à la situation envisagée. Jung écrit dans Dialectique du moi et de l’inconscient ( p.189) :

“Les opinions de l’animus ont souvent le caractère de convictions solides … En réalité, ces opinions ne sont ni motivées, ni le fruit d’un acte de pensée ; elles existent toutes faites, comme préfabriquées et prêtes à la consommation ; elles sont présentes dans l’état mental de la femme, qui les formule et les répète parce qu’elles ont dans son esprit un tel caractère de réalité et une telle force de conviction immédiate qu’elle n’est même pas effleurée par l’idée de les soumettre à la possibilité d’un simple doute”

La pluralité de l’animus

Au niveau de la représentation et du symbole onirique, il apparaît logique que l’animus se personnifie d’une manière masculine. C’est un peu plus compliqué que pour l’anima car, si l’homme sur le plan de l’inconscient est monogame, celui de la femme est polygame. En effet, l’animus se présente d’une manière plurielle :

“L’animus est quelque chose comme une assemblée de pères ou d’autres porteurs de l’autorité, qui tiennent des conciliabules et qui émettent ex cathedra des jugements “raisonnables” “inattaquables

Il est parfois symbolisé par un groupe de personnes quand il représente un élément collectif. C’est alors que les discours des femmes dominées par cet animus, et ceci se retrouve dans les séries de rêves, sont truffés de ON  : on dit que, tout le monde pense, on doit.

La pluralité de l’animus a pour conséquence que les hommes sur lesquels il est projeté doivent être des hommes possédant toutes les qualités, y compris l’omniscience et, comme le dit Jung, être “une réédition du Bon Dieu.”

Les quatre paliers d’évolution de l’animus

C’est uniquement parce que l’animus est extraverti qu’il a des manifestations négatives, car son véritable rôle est de rendre possible la relation entre le Moi féminin et l’inconscient. Quand il remplit sa fonction, et que la femme affronte son animus au lieu de se laisser posséder par lui, il a des effets tout à fait positifs qui se traduisent par quatre paliers d’évolution, à la fois semblables et différents de ceux de l’anima .

Les stades de développement de l’animus sont décrits dans L’homme et ses symboles par marie Louise von Franz (p.194) :

Au premier niveau, il se présente sous un aspect purement physique, un athlète par exemple.

Au deuxième niveau, il n’est plus seulement beau ou fort mais possède “l’esprit d’initiative et la capacité d’agir d’une façon organisée”.

Au stade suivant, on le retrouve souvent sous la forme d’un professeur ou d’un prêtre devenant ainsi le verbe.

Au niveau supérieur, il devient, comme l’anima , le médiateur de l’expérience religieuse et donne à la femme une fermeté spirituelle. Il la relie, à ce quatrième niveau, au domaine de la spiritualité et des idées créatrices, auxquelles elle est alors encore plus réceptive que l’homme.

Anima et animus par leur aspect positif sont donc des psychopompes . L’anima, reconnue et intégrée, devient un éros du conscient et lui confère le lien et la relation. L’animus devient un logos qui donne au conscient de la femme réflexion, raisonnement et connaissance.

Les relations entre l’anima et l’animus

Les deux thèmes essentiels de la problématique Jungienne polarité et relation sont clairement mis en évidence au niveau de l’anima et de l’animus.

Jung voit, dans la combinaison du Moi – Toi et anima-animus, des relations ternaires et quaternaires, tout à fait indispensables à la totalité. Pour lui, l’homme qui n’est pas relié, ne possède pas la totalité, car il ne peut exister sans son autre côté qui est toujours le Toi. Nous trouvons dans Psychologie du transfert (p.81) une description des relations croisées possibles entre l’homme, la femme, leur animus et leur anima qui peut être illustrée par le schéma suivant adapté du schéma de Jung, même ouvrage, même page :

Homme Femme Animus Anima

a) représente une relation personnelle sans complications,

b) représente une relation de l’homme avec son anima et, en miroir, la relation de la femme avec son animus,

c) figure la relation entre les deux animus : animus avec anima et inversement,

d) Il s’agit de la relation de l’animus féminin avec l’homme, lorsque la femme est identique à son animus et de la même relation anima masculine-femme lorsque l’homme est identique à son anima.

La complexité de ces possibles interactions explique, en partie, les difficultés de communication entre hommes et femmes : ils se croient deux et, en fait, ils sont souvent trois ou quatre. On ne s’ennuie pas dans l’inconscient !

Dans Aïon, (p.35), Jung analyse la part de transcendant et les éléments nécessaires pour que se réalise une totalité constituant un schéma du Soi. Il décrit ainsi ce processus :

“De cette dernière connaissance”(de l’anima ou de l’animus dans la relation avec le sexe opposé)”naît chez l’homme une triade qui est transcendante dans la proportion d’un tiers : le sujet masculin, le sujet féminin qui lui fait face, et l’anima transcendante. Chez la femme le processus est analogue, mais sur un mode inversé Le quatrième qui manque à la triade pour réaliser une totalité est, chez l’homme, l’archétype du vieux sage que je n’ai pas fait rentrer en ligne de compte, tandis que, chez la femme, c’est la mère chthonienne. Ceux-ci constituent une quaternité mi- immanente et mi- transcendante, à savoir cet archétype que j’ai qualifié de quaternion (ou mariage quaternaire). Ce dernier constitue un schéma du Soi aussi bien que des structures sociales primitives. Le Soi est d’autre part une image de Dieu dont elle ne se laisse pas différencier”.

Les symboles de l’anima et de l’animus, le vieux sage, la mère chtonienne, sont, comme l’image de Dieu, des représentants du Soi. Ils sont les acteurs de premier plan des séries de rêves, et aussi de l’existence quotidienne, en particulier dans le domaine relationnel. Et la conscience ne les voit pas !

En savoir plus

Publié initialement dans le cadre d’une thèse cette page a été adaptée par Ariaga (Ariane Callot), son auteure.
Les ouvrages cités sont référencés à la page bibliographie.


Ariaga
Ariane Callot

Ariane Callot est docteur en philosophie. Elle a soutenu en 2000 une thèse orientée sur Jung. Sous le pseudo d’Ariaga elle est l’auteur du blog Extraits du Laboratoire d’Ariaga.

Ariane Callot

Cheminant dans les pas de Jung, j’ai tenté de donner à penser que l’on peut, par l’intermédiaire des série de rêves, observer les re-présentations structurelles et symboliques d’un enseignement de l’inconscient …
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