Contenir, symboliser, transmettre : à travers leurs expériences cliniques, Nicolas Elias, Christine Fouchard et Ève Pilyser ont témoigné du rôle structurant des contes dans les ateliers thérapeutiques
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Numéro 7 – 15,5 cm x 22 cm x 0,6 cm – 64 pages
Sous la conduite de Nathalie Dominguez, la Société Française de Psychologie Analytique (SFPA) a proposé le 13 mai 2023 une journée d’études consacrée aux contes et à leurs résonances profondes dans le champ de la psychologie jungienne.
Cette journée, comme le souligne Nathalie Dominguez « a su réveiller ce qui était assoupi dans notre âme d’enfant ». Elle écrit aussi que conter n’est pas simplement parler, mais un « toucher si particulier des mots, du timbre et du sens, jusque dans nos cellules afin de devenir un récit ».
Le médium conte dans les thérapies groupales d’enfants
Nicolas Elias a partagé une riche expérience clinique menée auprès d’enfants en thérapie groupale dans un CMPP. Il montre comment les contes, porteurs d’images archétypiques, peuvent devenir de véritables leviers thérapeutiques.
Partant du cas de Maxime, un enfant mutique et figé, il décrit comment un rêve contenant un loup « imposant et immobile » a marqué un tournant dans la relation. Cette figure du loup, tout à la fois terrifiante et protectrice, a permis de mettre en mouvement la psyché de l’enfant :
« Je vis en lui un allié sûr dans le travail. Sa numinosité m’avait contaminé au point de me redonner confiance. » (p 13)
S’appuyant sur l’approche jungienne, il développe une réflexion sur les effets structurants du cadre groupal, de la symbolisation par le corps et de la ritualisation du conte :
« Le travail thérapeutique repose sur le revécu archétypique collectif du groupe au sein duquel pourront s’instaurer, puis se dégager, des aspects singuliers de chaque enfant. » (p 16)
De bouche à oreille, tout près, tout près
Christine Fouchard a puisé dans sa longue pratique des ateliers contes une réflexion sensible sur la transmission vivante des récits. Pour elle, le contage n’est pas seulement récit mais mise en relation, vibration partagée :
« Il n’y a pas de contage sans reconnaissance de l’érotisme éprouvé à conter, à jouir de sa phonation dans une décharge pulsionnelle. » (p 26)
Elle décrit avec justesse les différents niveaux de symbolisation (parole, image, corps) et la dynamique du groupe dans l’atelier thérapeutique. Elle évoque aussi la puissance de la « palabre », ce temps de parole libre et associative où le conte peut ouvrir à la transformation intérieure :
« Parler autour du conte, c’est aussi toujours avoir à l’esprit que les relations transférentielles projetées sur les adultes ne sont pas uniquement alimentées par des projections parentales mais qu’une part de ces projections puise ses contenus directement dans le conte. » (p 31)
Dans l’ombre du conte : le récit occulté et tronqué
Ève Pilyser propose une lecture critique et audacieuse des interprétations classiques du conte, souvent dominées par la théorie œdipienne. Elle invite à prendre en compte ce qu’elle nomme le « complexe contre-œdipien parental », ces projections parentales qui pèsent lourdement sur l’enfant et sont souvent à l’œuvre dans les récits.
Avec rigueur, elle interroge la tendance des lectures projectives à minimiser les violences symboliques parentales dans les contes :
« Il me semble que nous devons assumer pleinement et éthiquement nos fonctions éducatives et parentales sur un registre mature et adulte en acceptant de faire une lecture simple, littérale, des contes, tel qu’en tout premier lieu les enfants en reçoivent le récit. » (p 34)
Elle appelle à entendre dans ces récits combien les contes peuvent aussi devenir des espaces de résistance intérieure.
Cette journée d’études a permis de mesurer combien les contes, loin d’être de simples récits pour enfants, sont des chemins de transformation intérieure, porteurs de potentialités thérapeutiques profondes.
Les publications de la SFPA
(Présentées sur le site EFJ)
Ouvrage
Actes des colloques
- 1 – Jung et l’alchimie du temps (16 novembre 2019)
- 2 – Dissidence en psychanalyse (3 octobre 2020)
- 3 – Technologies et inconscient (10 avril 2021)
- 4 – Couleurs alchimiques – La vie en jaune (9 octobre 2021)
- 5 – Jung et l’œuvre du féminin dans la psyché (19 novembre 2022)
- 6 – L’approche jungienne à la croisée de la psychiatrie et de la psychanalyse (9 avril 2022)
- 7 – Qu’est ce que l’on se raconte comme histoire ? (13 mai 2023)
- 8 – Couleurs alchimiques. La vie en rouge (2 décembre 2023)