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Ariane Callot

Ariaga
Ariane Callot est docteur en philosophie. Elle a soutenu en 2000 une thèse orientée sur Jung.

Sous le pseudo d’Ariaga elle est l’auteur du blog Extraits du Laboratoire d’Ariaga.

Sur le présent site elle publie des textes repris de sa thèse, des écrits sur Jung et des poésies.

Wolfgang Pauli : Le temps et la place du centre

Comment se retrouvent dans la série du Rêveur de Carl Jung : le temps du rêve, la recherche du point central du mandala et la possibilité de faire coexister des systèmes incompatibles.

Du temps quotidien au temps du rêve et de l’éternité

Le temps du mandala de l’Horloge du Monde de Wolfgang Pauli est celui d’une organisation consciente, réclamant des repères tels que les années, les saisons, les marées, les horloges. Cet encadrement du temps, est nécessaire pour que le Moi du Rêveur ressente une impression d’harmonie.

N’oublions pas que c’est Pauli lui-même qui a, selon Jung, appelé sa vision Vision de la Grande Horloge du Monde, donnant ainsi une dimension plus vaste et plus métaphysique au mandala final.

Ce qui relève de l’inconscient paraît jouir d’une sorte de pérennité le situant hors des cycles du temps du Moi conscient. C’est un temps qui a toujours été là. Ceci est manifeste au rêve 9 qui est :

Une horloge à balancier, qui fonctionne perpétuellement sans que les poids descendent.

Le temps du rêve, ou plutôt son atemporalité, est étranger au Moi conscient. Le fait que le Rêveur attribue une dimension quasi cosmique à sa vision dénote son désir d’une relation destinée à opérer une symétrisation avec l’inconscient, et un élargissement du champ de sa conscience.

Voir les rêves de la série du rêveur

Le besoin de symétrie

La forme choisie, le mouvement circulaire, la temporalité, ont été annoncés au cours de la série et se retrouvent dans le mandala final. Ils représentent l’aboutissement des intentions d’un Soi effectuant sa fonction d’harmonisation interne tout en représentant au Rêveur une image construite aux normes de sa raison.

Il manque cependant une des composantes : l’insertion dans l’espace en un lieu propre à satisfaire le besoin de symétrie, essentiel pour un scientifique tel que le Rêveur.

Pour Roland Omnès  dans Philosophie de la science contemporaine (p. 375 sq.) cohérence et beauté vont ensemble pour l’homme de science et la construction scientifique “intègre l’une des plus riches facettes de notre humanité, celle de l’esthétique”. Le besoin de la symétrie est une telle motivation pour les scientifiques qu’il est à l’origine de découvertes telles que celle de l’anti-électron et de l’antimatière.

Nécessité d’une détermination exacte du centre

Un processus essentiel de la construction du mandala est la réussite d’une détermination exacte du centre géométrique à partir duquel partent les lignes verticales et horizontales.

C’est, en effet, au niveau de la recherche d’une bonne figure de distribution spatiale équilibrée, que la coopération du Rêveur et de l’inconscient se manifeste avec le plus d’évidence.

L’espace est semblable à un écran de projection des tensions dont l’axe focal serait le centre. Un centre qui est à la fois un lieu de rencontre et de coexistence des forces opposées, et un foyer d’où rayonnent les lignes d’insertion dans l’espace nécessaire à la cognition humaine.  Cela demande une détermination des verticales et des horizontales, du haut et du bas, de la droite et de la gauche. Ces lignes manifestent le processus centralisateur de l’inconscient qui pousse sans cesse vers la conscience l’idée du centre, du point d’équilibre, du juste milieu.

Recherche de la position centrale dans les rêves

C’est le Rêveur lui-même qui, très précocement (au rêve 5), détient une position centrale, symbolisée par son enracinement dans le sol, comme un arbre.

Il n’y a là, à cette époque de la série, aucune abstraction et nous restons au niveau de la symbolique d’un homme ayant édifié autour de lui, un temenos , un cercle protecteur, contre les dangers de l’extérieur et de l’intérieur, c’est-à-dire contre toutes les menaces susceptibles de porter atteinte à son Moi conscient.

Le Rêveur se situera encore au centre du cercle vers la fin des rêves initiaux (rêve 21), mais non enraciné dans le sol, et perdra définitivement sa position centrale au rêve 16 de la deuxième série, où il se trouvera relégué sur le côté d’un carré. Il sera alors clair, que le Moi du Rêveur ne peut pas revendiquer, seul, cette position centrale.

Déterminer le point exact du centre génère une angoisse, dont l’acmé se situe au long et important rêve 22, au cours duquel des soldats chargeant leurs fusils, forment un cercle et se préparent à tirer sur le centre. Ils y renoncent, pour des raisons inconnues. Il demeure que cette destruction aurait certainement causé un dommage irréparable, ce qui explique la sensation d’angoisse. En effet, le rêve insiste sur le côté essentiel de la conservation de ce centre.  En effet, il est écrit au Rêveur sur le billet rédigé par l’ami :

Le salut vient d’un abandon total dans lequel le regard doit être fixé sur le centre.

Le problème de la possibilité de la perte dramatique du centre avait été évoqué dès le rêve 8.

Voir les rêves de la série du rêveur

Cherchant une méthode pour faire le point, on peut interpréter faire le point comme trouver le point central, le Rêveur était tantôt trop loin, tantôt trop près.

Il avait rêvé auparavant, dans un songe évoqué par Jung mais non répertorié, qu’il tirait sur une cible.  Il tirait tantôt trop haut, tantôt trop bas. Le but exact était le milieu. Les deux rêves lui firent l’impression d’être très significatifs. Il avait donc, consciemment, compris l’importance de la détermination de ce point central.

Le fait que le Rêveur prête attention aux enseignements de l’inconscient est récompensé par la découverte d’un beau jardin disposé symétriquement, avec une fontaine au milieu. (rêve 13)

Cette vision ne peut que plaire au Rêveur, à la recherche d’une symétrie, mais, pour atteindre ce centre, il faut explorer la partie basse de la perpendiculaire, en plongeant dangereusement dans les profondeurs. Il tombera encore dans les profondeurs au rêve 39 pour y trouver un ours à quatre yeux. Là aussi le rêve se termine d’une manière positive montrant que ces plongées dans les couches instinctives de l’inconscient, même si elles sont périlleuses, peuvent avoir leur récompense.

La partie supérieure de la perpendiculaire, la hauteur, est représentée par le vol en avion du rêve 11, ou la montée en ascenseur du rêve 22 et, tout à la fin de la série, par l’aigle de l’impression visuelle 57.

On voit que, dès qu’il s’agit de la détermination du centre et de ses axes, les formes sont difficilement séparables des symboles.

Deux systèmes incompatibles peuvent exister ensemble

Le Rêveur, probablement lassé par le côté anecdotique, et parfois incohérent à ses yeux de scientifique, des scénarios de l’inconscient, a décidé de mettre de l’ordre dans cet apparent désordre et, comme nous l’avons déjà dit précédemment, il s’est mis à dessiner, à la suite du rêve 23 dont la richesse symbolique avait dû déclencher un besoin compensatoire d’explication rationnelle et de systématisation.

Les nombreux dessins qui, en un laps de temps très court, suivent le rêve 23, s’occupent tous de la structure singulière du centre et expriment le désir du Rêveur de retrouver une configuration exprimant de manière adéquate la structure de ce centre. Il privilégie finalement la forme d’une roue à huit rayons, forme qui annonce à la fois la préoccupation très géométrique du rêve 25, et un fort désir de totalité.

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Le rêve 25 est abstrait :

Il s’agit de construire un point central et de rendre la figure symétrique par réflexion en ce point.

Jung voit dans cette symétrisation une réponse au rêve 22, tellement angoissant, où il avait été question d’étrangler complètement la gauche. Voici ce qu’il écrit dans Psychologie et alchimie (p.224) :

“Comme la “droite”représente la conscience, son univers et ses principes, la “réflexion” doit entraîner une révolution de l’image du monde vers la gauche, produisant ainsi une image correspondante inversée. On pourrait tout aussi bien dire que, grâce à la “réflexion”, la droite apparaît comme l’inverse de la gauche. La gauche, semble, par conséquent, se trouver sur un pied d’égalité avec la droite ; en d’autres termes, l’inconscient, avec son ordre en majeure partie incompréhensible, devient le complément symétrique de la conscience et de ses contenus. …

En poussant ce raisonnement plus loin, on pourrait considérer le “centre” comme le point d’intersection de deux mondes correspondants mais inversés par réflexion. L’idée de la symétrisation indiquerait donc un point culminant du processus de reconnaissance de l’inconscient et d’incorporation de ce dernier dans une image générale du monde. L’inconscient atteint ici à un caractère “cosmique”.

Nous ajouterons au commentaire de Jung, notre impression qu’il existe chez le Rêveur un désir profond de trouver une combinaison symétrique et unitaire génératrice d’un ordre grâce auquel deux systèmes apparemment incompatibles peuvent exister conjointement : espace et temps, onde et particule, tout ce qui nourrit le rêve scientifique de la “Grande Unification”.

Au moment de la Grande Vision finale, ce point d’unification se situera au centre commun du cercle vertical et du cercle horizontal de l’Horloge du Monde.

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Publié initialement dans le cadre d’une thèse cette page a été adaptée par Ariaga (Ariane Callot), son auteure.
Les ouvrages cités sont référencés à la page bibliographie.


Ariaga
Ariane Callot

Ariane Callot est docteur en philosophie. Elle a soutenu en 2000 une thèse orientée sur Jung. Sous le pseudo d’Ariaga elle est l’auteur du blog Extraits du Laboratoire d’Ariaga.

Ariane Callot

Cheminant dans les pas de Jung, j’ai tenté de donner à penser que l’on peut, par l’intermédiaire des série de rêves, observer les re-présentations structurelles et symboliques d’un enseignement de l’inconscient …
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