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Ancienne présidente de la Société Française de Psychologie Analytique (SFPA), Viviane Thibaudier a dirigé pendant plus de 10 ans l’Institut C.G. Jung de Paris. Elle répond à nos questions à l’occasion de la sortie de son livre 100% Jung.
Viviane Thibaudier Parce que la pensée de Jung ne correspond pas au cartésianisme français. Jung trouble par la profusion de ses idées et la véritable « complexité » de sa pensée. Ses concepts ne sont pas des abstractions, il va les puiser dans l’expérience uniquement. Celle du psychiatre qu’il a été avec ses patients et la sienne propre, comme l’atteste la très touchante exposition à propos de son Livre Rouge présentée actuellement au Musée Guimet.
Ce sont les différents aspects de la personnalité de chacun que nous avons généralement tendance à projeter sur autrui. L’ombre, la part obscure de nous-mêmes ; la persona, la façade conventionnelle qui nous protège d’une vraie rencontre avec autrui ; notre complément sexuel inconscient : anima pour l’homme, animus pour la femme, que nous préférons généralement demander à notre conjoint d’incarner pour nous. Le Soi est le centre de la personnalité « totale » c'est-à-dire consciente « et » inconsciente, c’est ce qui nous pousse à nous réaliser, une sorte d’instinct à devenir ce que nous sommes. La synchronicité correspond à la simultanéité, sans raison apparente, d’éléments extérieurs avec certains états psychiques. C’est ce que Jung appelle des correspondances signifiantes.
Pour Jung, l’inconscient est un réservoir extraordinaire où est stockée la mémoire de l’expérience humaine depuis l’origine de l’humanité. C’est un capital considérable qui nous permet d’être en contact avec nos racines les plus profondes et nos instincts les plus primitifs. Pour Jung l’inconscient a donc un savoir ancestral qu’il nous transmet sous forme de symboles et, de fait, une créativité. C’est de lui que naît toute chose.
« Jung n'essaie pas de nous façonner, de nous faire entrer dans un schéma préconçu. » |
Jung n’essaie pas de nous façonner, de nous faire entrer dans un schéma préconçu. Il accepte l’être tel qu’il est, et considère la névrose davantage comme une recherche naturelle d’équilibre et de guérison que comme une tare. Il essaie d’en tenir compte et, partant de là, de voir le côté positif et créatif qui nous a fait être tel que nous sommes.
Une relation très humaine faite d’engagement personnel. À ce propos il était très en avance sur son temps. On peine aujourd’hui encore à trouver ce genre de relation médecin-patient dans les hôpitaux psychiatriques, à l’exception de quelques rares établissements de pointe. La psychiatrie n’a pas beaucoup évolué en un siècle à ce niveau.
C’est l’expression de notre réalité intérieure. Ce qui nous permet d’entrer en contact avec les contenus – inconnus de nous - de ce réservoir dont je vous parlais tout à l’heure. C’est à travers les images des rêves que ces contenus se présentent à notre conscient sous une forme qui nous devient ainsi accessible. C’est l’occasion pour chacun de se transformer à l’écoute de ces « messages » qui viennent du tréfonds de l’âme humaine. Quelque chose qui n’est pas gouverné par le moi et la conscience et qui nous force à prendre en compte l’autre aspect de nous-mêmes. Ils donnent ainsi un autre sens à notre vie.
Oui, en effet, et de plus en plus apparemment aujourd’hui où tout est maîtrise et précipitation. Laisser advenir mais aussi accepter de ne pas plaquer une interprétation toute faite sur ce qu’il se passe. Accepter de comprendre les choses « autrement », dans son ressenti, avec son cœur, et non avec sa tête uniquement. Jung a d’abord vécu les choses dans son corps, dans son âme avant d’en faire des concepts. C’est ce qui en fait la vraie richesse et l’universalité. Il a compris plus tard qu’il était ainsi très proche des courants philosophiques orientaux où l’on retrouve à travers des pratiques parfois millénaires, les mêmes idées que celles de Jung correspondant aux mêmes instances psychiques.
Nous allons y découvrir celui ou celle que nous sommes vraiment et qui, pour des raisons complexes, vit amputé d’une part essentielle de lui-même. L’être « entier » que nous sommes mais qui n’est pas encore né et qui attend patiemment qu’on lui donne vie.
Lire l'entretien de présentation de son livre L'inconscient et ses images.
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