F. David Peat (1938-2017), un physicien anglais, spécialiste de la mécanique quantique, admirateur des théories de Jung sur la synchronicité, et collaborateur de David Bohm, a écrit un livre qui s’intitule: Synchronicité. Le pont entre l’esprit et la matière.
Ariane Callot – Octobre 2019
Certains livres sont des révélations. On les lit avec passion, ils influencent votre pensée et puis, par une sorte de processus alchimique, ils sont assimilés et quelque peu oubliés. C’est le cas pour l’ouvrage de David Peat, publié en 1987, que je viens de relire et qui m’a semblé tout aussi inspirant qu’à la première lecture.
David Peat se fait l’écho de la recherche par certains physiciens d’un principe unifiant. Il nous fait voyager avec W. Pauli, I. Prigogine, D. Bohm, J. Wheeler, R. Sheldrake et surtout C. G. Jung qui est un fil conducteur du livre.
Je ne peux, pour vous donner juste une idée de cet ouvrage passionnant et d’une lecture relativement facile, que vous proposer quelques extraits. Les caractères gras sont un ajout de ma part destiné à attirer l’attention sur ce qui m’a semblé essentiel.
« L’image suggérée par les mathématiques non linéaires est une image où l’univers apparaît comme une totalité une et indivise, et où ses structures existent en fonction d’un arrière plan plus large. Manifestement, cette image n’est pas loin de celle qui s’applique à la synchronicité.
Par ailleurs, cette approche peut éventuellement intégrer l’esprit, puisque la conscience elle aussi peut être considérée comme provenant d’un plan plus profond, commun à la fois à l’esprit et à la matière. En ce sens, donc, on peut voir les modèles déployés de l’esprit et de la matière, qui sont observés lors d’un événement de synchronicité, comme émergeant d’un principe unique. » (p.98)
Comme il a été question de synchronicité je vous propose ce qu’en écrit David Peat se référant à Jung :
« C.G. Jung a défini la synchronicité comme la coïncidence dans le temps de deux ou plusieurs événements sans relation causale et ayant le même contenu significatif.
Ce qu’il insinue est clair : certains événements dans l’univers se rassemblent dans des structures de signification, sans avoir recours au phénomène normal de cause à effet de la causalité. ces phénomènes synchronistiques doivent donc transcender les lois normales de la science, car ils sont l’expression de mouvements bien plus profonds, qui prennent naissance dans les fondements de l’univers et incluent d’une façon inséparable, à la fois la matière et la signification. » (p.49)
J’ajoute à cette définition le passage suivant qui résume la thèse de l’auteur :
« C’est cependant la thèse de ce livre, qu’en fait un pont peut être construit entre le monde intérieur et le monde extérieur, et que la synchronicité en constitue le point de départ. Car elle représente une minuscule brèche dans l’édifice de tout ce que nous avons pris jusqu’ici pour la réalité.
La synchronicité nous permet de regarder et de plonger au-delà de nos notions conventionnelles de temps et de causalité, dans l’immensité des modèles de la nature, dans la danse fondamentale qui relie toutes choses, et dans le miroir qui est suspendu entre l’univers intérieur et l’univers extérieur.
Avec la synchronicité comme point de départ, il est possible de construire un pont reliant les mondes de l’esprit et de la matière, et ceux de la physique et de la psyché. » (p.11)
Dans la dernière partie du livre D. Peat évoque l’idée d’une source créatrice de la totalité qu’il appelle l’origine sans nom et dont on ne pourrait enfermer l’essence en pensée ou en mots :
« Si cette source est vraiment l’origine créatrice de tout le réel, alors comment est-il possible d’en parler ou bien même d’y penser ?
Étant complètement inconditionnée et éternellement créatrice, elle devrait en effet se trouver en dehors de notre champ d’expérience. Pourtant les anciens affirmaient que l’homme est la mesure de toute chose. Et l’on interprétait cela, dans les traditions mystiques, en disant que l’homme est le microcosme dans lequel se reflète tout l’univers.
De façon analogue, l’idée d’un ordre impliqué-involué suppose que le tout de la réalité est plié en chaque individu. Ainsi, le microcosme pourrait se présenter comme une succession de correspondances de tout l’univers, qui inclurait et irait encore plus loin que la conscience et la matière. Involué en chacun de nous se trouverait un principe implicite, qui serait entretenu par le flot éternel qui monte de la source sans nom de la créativité. » (p.218)
Ils sont rares les ouvrages qui résistent à l’épreuve du temps, dans un monde où tout se remplace et s’efface de plus en plus vite. Quand je lis, à la dernière page du livre ce qu’écris David Peat :
« La synchronicité a donc servi de point de départ à un voyage qui nous a conduit aux limites de l’imagination. En réalisant que notre conscience est infinie, il nous est possible de transformer nos vies et la société de manière active. »
il m’apparait comme une évidence que, même si c’est souvent d’une manière subliminale, il a été présent à mes côtés dans beaucoup de mes textes sur Jung. Je pense, par exemple aux Moments d’harmonie dans les séries de rêves.