Rechercher Faire un don Espace Francophone Jungien
Accueil    C.G. Jung    Son oeuvre    Articles    Séminaires    Ressources    Livre Rouge    Sites jungiens    Contact

Espace Francophone Jungien menu

Parole et guérison – Jung et Sabina Spielrein – Pièce de Christopher Hampton

Présentée au Festival Off d’Avignon du 5 au 26 juillet 2025, la pièce Parole et Guérison, de Christopher Hampton (adaptée par Didier Long), est mise en scène par Nora Giret, qui y incarne également Sabina Spielrein. Elle a accepté de répondre à nos questions.

Zurich, été 1904. Quand Sabina Spielrein entre dans le cabinet de Carl Gustav Jung, l’un et l’autre vont être bousculés. Pour elle, c’est le premier pas vers la rémission. Pour lui, c’est une nouvelle étape capitale dans son travail : expérimenter la « cure par la parole » théorisée par Sigmund Freud. La patiente et le thérapeute sont tous deux pionniers et prendront conscience de la grandeur de leur travail. Leur lien est à l’origine de découvertes majeures mais aussi source de névroses que la psychanalyse dénonce.

EFJ : Parole et Guérison met en lumière un moment fondateur de la psychanalyse. Qu’est-ce qui vous a donné envie de porter cette pièce sur scène aujourd’hui ?

Nora Giret : C’est essentiellement la personnalité du personnage féminin Sabina Spielrein qui m’a poussée à vouloir monter cette pièce. J’ai tout de suite été séduite par sa détermination, sa liberté à une époque où ça n’allait pas de soi, surtout pour une femme.

Plus généralement, c’est le combat de tous les instants des personnages/personnes pour leur liberté. Cette tension permanente entre leur désir et les devoirs sociétaux tout en voulant mettre en place une idée nouvelle.

Vous incarnez Sabina Spielrein, une figure pionnière souvent restée dans l’ombre. Qu’avez-vous découvert à son sujet en travaillant ce rôle ?

Je tiens à dire que je ne connaissais pas du tout la vie de Sabina. Mon attrait pour le personnage provient initialement de la pièce.

Cependant, mon travail interprétatif m’a amené à découvrir qu’elle a été une figure fondamentale de la psychanalyse. Son apport, notamment dans la psychologie pédiatrique a été reconnu a posteriori, non seulement par ses pairs mais également par les modernes. J’ai appris par exemple qu’elle avait notamment analysé Jean Piaget, une figure majeure de la psychologie du développement.

Thibault Truffert (Carl Gustav Jung) et Nora Giret (Sabina Spielrein) 

Plus largement, qu’est-ce que vous et l’équipe avez appris des personnages en les jouant sur scène ? Y a-t-il des aspects qui vous ont personnellement touchés ?

L’interprète du personnage de Jung [ndlr : Thibault Truffert] me disait qu’il avait le sentiment que c’était au comédien d’apporter au personnage son vécu personnel, plutôt que l’inverse. Je partage en partie ce point de vue. Au départ, on a « seulement » un texte, des personnages qui disent des mots. Leur signification, leur sens dépend de l’interprète mais aussi de la metteuse/metteur scène ; de toutes les personnes “réceptrices”. Bien sûr on veut être fidèle à l’auteur/e, mais la subjectivité est inévitable.

Ce qui nous a touché globalement c’est le concentré d’humanité des personnages transmis par l’auteur. Elle amène la possibilité de jouer avec notre instrument, c’est à dire nous, de manière complexe et riche.

Carl Gustav Jung occupe une place centrale dans la pièce. En tant qu’artistes d’aujourd’hui, que retenez-vous de sa pensée ? A-t-il, selon vous, quelque chose de profondément actuel ?

L’un des aspects qui m’a interloqué, est la désacralisation qu’opère l’auteur. Christopher Hampton nous montre que ces grands personnages ne sont pas nés avec la science infuse. Jung n’a pas toujours su formaliser le concept de complexe. Cette connaissance émerge des aléas de leur vécu, de leurs errances, leurs erreurs et de quelque chose d’assez chaotique finalement. Je dirais que la pensée de Jung reflète cela, comme cette pièce, et c’est ce qui les rend profondément actuelles.

Thibault Truffert (Carl Gustav Jung) et Swan Starosta (Emma Jung) 

La pièce interroge la puissance – mais aussi les limites – de la parole comme outil de guérison. Comment avez-vous choisi de mettre en scène ce processus psychique ?

Il est intéressant et amusant de noter que l’auteur même du concept d’inconscient collectif soit lui-même aussi présent dans l’inconscient collectif moderne. La pensée de Jung influence énormément notre manière de nous percevoir en tant qu’humains occidentaux, mais également notre façon de construire nos personnages en tant que comédien/nes. On doit notamment à Jung le sens commun donné au mot archétype, et sa mise en application dans l’analyse d’œuvre du répertoire classique. Le biais d’analyse psychologique littéraire est très jungien.

C’est difficile de dire “choisi” c’est quelque chose qui se glisse inconsciemment, on suit l’œuvre et ce qu’elle dit et l’œuvre nous suit, cet aller-retour est fluide. Il s’agit encore une fois d’une œuvre qui parle de l’humanité, l’intime et l’universel sont intrinsèquement liés. Je crois que ça se diffuse ou s’exprime malgré nous, même si l’on fait des choix précis de mise en scène.

Le théâtre permet de rendre vivants des savoirs complexes. Comment avez-vous abordé la mise en scène pour que le public puisse entrer dans cette histoire, même sans connaissance préalable de la psychanalyse ?

La mise en scène s’est imposée d’elle-même, elle s’est adaptée au rythme de l’écriture. Christopher Hampton a une écriture très dynamique. Le sujet de son œuvre n’est pas tant la « technique » de la psychanalyse que les tergiversations, les réflexions des personnages. La psychanalyse est le prétexte qui permet de parler des émotions, tiraillements dans la vie des personnages et peuvent tous nous traverser de près ou de loin.

Enfin, qu’aimeriez-vous que le public retienne en sortant de la salle ? Une émotion, une idée, une question ?

Beaucoup de choses et ça va sûrement encore changer car elle nous imprègne de manière différente en fonction des jours. Pour l’instant, je dirais : la liberté, que tout est possible pour les femmes et les hommes. Que la vie de Sabina Spielrein soit inspirante.

En mettant en lumière l’engagement de Sabina Spielrein dans la psychanalyse, Parole et Guérison reflète une dimension essentielle de la pensée jungienne : la reconnaissance de la complexité humaine et des conflits intérieurs comme moteurs de transformation. À travers le théâtre, ce sont les tensions fondatrices de la psychologie analytique qui se rejouent, et nous invitent à interroger notre rapport au soin, à la parole, et à l’inconscient.

Pour en savoir plus sur Sabina Spielrein, découvrez notre dossier qui lui est consacré.

Juillet 2025


Espace Francophone Jungien - cgjung.net
Espace Francophone Jungien
Menu principal Faire un don
Page d'accueil
Carl Gustav Jung
Ouvrages de C.G. Jung
Articles et entretiens
Séminaires de formation
Ressources jungiennes
Le Livre Rouge de C.G. Jung
Marie-Louise von Franz
Sites jungiens
Mises à jour du site
Formulaire Contact
Qui sommes nous ?
Rechercher sur le site
Plan du site
Facebook
Jungian Psychology Space
Haut de page

cgjung.net © 1998 -